Interview d’Isabelle Cals, soprano

Tutti-magazine Lorsque nous avons entendu Isabelle Cals sur la scène de l'Opéra de Tours dans le périlleux Lied de Richard Strauss "Frühlingsfeier", nous avons été surpris au-delà des mots par ses aigus lancés comme autant de flèches expressives et incandescentes au-dessus d'un orchestre pourtant très sonore… Cette aisance vocale dans les notes les plus hautes que pourraient lui envier nombre de sopranos se confirmait ensuite dans sa Sieglinde face au Siegmund sensible et humain de Nikolai Schukoff. Puis, quelques semaines après, nous retrouvions Isabelle Cals dans le rôle venimeux à souhait de la Princesse étrangère de Rusalka, à laquelle elle insufflait une grâce de danseuse et une énergie vocale colorée par la noirceur du personnage…

Isabelle Cals J'ai habituellement une tendance marquée à l'autocritique et à me concentrer sur ce qui ne me satisfait pas en vue de pouvoir améliorer ce qui doit l'être, mais j'avoue être contente au lendemain de cette première. Ce personnage représente pour moi une nouvelle étape importante du point de vue du répertoire qui semble avoir été franchie avec une forme de validation quant à l'adéquation entre mes moyens vocaux actuels et ce type de rôle. De plus, la Princesse étrangère m'amuse énormément. Ce genre d'emploi est également assez nouveau sur le plan du tempérament, et de fait très inattendu dans l'esprit des gens car je n'ai pas pour habitude d'interpréter une vraie méchante. Mais je trouve ça assez jubilatoire car le jeu conduit nécessairement à l'excès. Incarner une telle femme est très libérateur.

Cela renvoie invariablement aux moyens vocaux dont on dispose et à l'évolution de la voix, mais les personnages excessifs sont ceux qui m'attirent le plus. Je me sens finalement plus apte à les habiter de manière intéressante que des profils peu marqués. J'en ai pris conscience depuis un moment car les rôles qui ont suscité en moi cet attrait et qui, semble-t-il, ont aussi le plus convaincu, étaient Mélisande, à mes tout débuts et, dans une moindre mesure car le rôle est court, Giulietta dans Les Contes d'Hoffmann. Puis il y a eu la Gouvernante dans The Turn of the Screw, que j'ai adoré chanter. J'espère que d'autres femmes de cette veine suivront…

Je pense que la puissance d'un rôle appelle en soi une réaction de moteurs psychologiques très forts qui se répercute sur le corps et favorise une expression qui ne sera pas forcément disponible pour un autre rôle. Ceci étant, il y a des limites au pouvoir de l'approche psychologique. Il m'est déjà arrivé de concevoir une vraie passion pour un personnage qui ne correspondait pas à ma tessiture, et les ressorts psychologiques n'ont pas été suffisants pour m'apporter les moyens vocaux requis ! Cependant, je ne doute aucunement du pouvoir de certains rôles à déclencher des réactions à la fois physiques et vocales.

Rusalka est mon premier opéra complet en tchèque, mais j'ai eu l'occasion de travailler plusieurs airs dans cette langue durant ma phase de recherche de répertoire. Par ailleurs, je ne crois pas qu'apprendre un rôle en tchèque soit pour moi différent que de travailler n'importe quel rôle dans une langue qui n'est pas la mienne. Lors d'une prise de rôle, je commence généralement par me procurer L'Avant-scène pour acquérir quelques clés et m'imprégner du livret en amorçant une traduction à l'aide du dictionnaire. Je commence ainsi par le texte et, lorsque celui-ci est en tchèque, je vais toujours trouver Irène Kudela qui est adorable et possède une oreille très fine ainsi qu'une perception très subtile de la psychologie des gens. On peut donc difficilement rêver à meilleure combinaison. Ensemble, nous nous concentrons sur le texte et elle veille à ce que je comprenne correctement le sens des mots tout en m'indiquant toute la prononciation. Je travaille ensuite chez moi, et lorsque j'ai mis la musique sur les mots et que je commence à posséder l'ensemble, je retourne voir Irène pour travailler le rôle.

Pas vraiment. J'ai plutôt constaté, en étudiant le chinois comme d'autres langues, que j'avais la chance de posséder une oreille qui me facilitait l'apprentissage. C'est ce qui m'a permis de faire du chinois et me permet de ne pas passer trop de temps à préparer un rôle en langue tchèque ou russe, par exemple. J'ai constaté que ma mémoire fonctionne d'une façon double : mon oreille est incontestablement sensible à la musique de la langue, mais je visualise aussi les pages de ma partition de façon précise jusqu'à pouvoir localiser les annotations que j'y ai portées. Pour moi, l'aspect sonore fonctionne donc de pair avec l'aspect visuel. Cependant, ma mémoire ne fonctionne vraiment correctement qu'avec le sens. Si je dois apprendre à la dernière minute dans une langue que je ne parle pas et que je ne comprends pas spontanément, la mémorisation est bien plus difficile. Le lien que je tisse entre la musique et le mot est extrêmement important. Du reste, lorsque je dis avoir aimé jouer tel ou tel personnage, c'est une sensation liée à ce lien qui s'exprime avant toute autre.

Cette collaboration a été très agréable car le metteur en scène m'a laissé proposer de nombreuses choses. Je dois dire que j'aime beaucoup cette manière de travailler car, s'il est indispensable de travailler sous le regard d'une personne, de même que la voix a besoin d'une oreille, j'arrive en répétition avec des images, des gestes et parfois aussi des expressions qui sont un peu comme des évidences issues du travail sur la musique et sur le rôle. Or curieusement, lorsque je me retrouve en répétition, ces moments-là sont justes et déclenchent l'adhésion immédiate du metteur en scène. Bien entendu cet apport personnel doit ensuite se fondre dans son approche. Par exemple, dans le cas de la Princesse étrangère, j'imaginais davantage une méchante sournoise et reptilienne qu'une furie s'exprimant par une violence manifeste. C'est aussi dans ce sens que j'avais travaillé avec Irène Kudela. D'autant que, vocalement, plus on s'exprime dans un répertoire dramatique et plus il est nécessaire de veiller à maîtriser l'aspiration à l'excès physique car elle est contre-productive. C'est une approche difficile à comprendre lorsqu'on est jeune chanteuse, et c'est pour cette raison que les professeurs conseillent d'attendre : un rôle dramatique demande une grande expérience de la maîtrise de son corps et de la gestion de la puissance… Dieter Kaegl s'est montré très ouvert et a très bien accueilli ma proposition puis, d'échanges en échanges, nous avons pu avancer de façon harmonieuse dans la mise en scène.

Lorsque nous avons abordé le programme du concert avec Benjamin Pionnier, il nous a fait des propositions et nous lui en avons fait en retour. C'est là que j'ai choisi ce Lied qui m'avait tant enthousiasmée lorsque je l'ai découvert. Le tempérament qui jaillit de "Frühlingsfeier" est incroyable et je ne peux pas mieux le comparer musicalement et intellectuellement qu'à Salomé. Or le rôle de Salomé est un des rôles que je rêve d'interpréter. Sur les conseils de mon professeur de chant actuel, Deborah Polaski, et grâce au chef de chant Jean-Marc Bouget, j'ai déjà eu l'occasion d'en tester discrètement la Scène finale dans le cadre d'un festival. Cela s'est vraiment bien passé, au point que des amateurs d'opéra sont venus me voir à la fin du concert pour me féliciter après m'avoir confié que leur première réaction, à la lecture du programme, avait été de me trouver gonflée de me frotter à ce répertoire… "Frühlingsfeier" était donc pour moi l'occasion de tester cette direction, grandeur nature, sur scène avec un orchestre.
Je me souviens du jour où j'ai apporté ce Lied à Deborah car sa réaction a été immédiate : "Mais qui a choisi ça… ?". Et, après avoir un peu hésité, je lui ai avoué : "C'est moi !". De fait, lors du concert à l'Opéra de Tours, c'est le Lied dans lequel je me suis sentie le plus à l'aise, sans doute parce qu’il déclenche en moi l'énergie qui va de pair avec l'envie d'exprimer ce genre d'écriture musicale. Aussi curieux que cela puisse paraître, je n'ai éprouvé aucune appréhension, d'autant que je pouvais m'appuyer sur une orchestration très porteuse, bien davantage que le piano en répétition. Pour tout vous dire, je me suis tout de même posé la question de savoir si on m'entendrait car l'orchestre, à Tours, était sur scène, mais j'ai conscience de me trouver à un moment de ma carrière où ce type d'exposition peut être vue comme une preuve. Venant du répertoire de mezzo, il est bon qu'on m'entende dans une œuvre qui montre mes capacités vocales.

Une carte de visite se doit d'être plutôt de nature opératique, même si ce Lied possède une incontestable dimension théâtrale. Alors, effectivement, pourquoi ne pas le proposer après en avoir expliqué la raison ? D'autant qu'il synthétise très bien mes possibilités vocales actuelles. Je sais d’ailleurs parfaitement que jamais je n'aurais pu le chanter lorsque j'étais mezzo… Symboliquement, le concert de Tours était très important à ce titre, et marquait l'aboutissement d'une transition très longue, bien plus longue que je ne l'imaginais, car voilà plus de 6 ans que j'ai commencé à chanter des rôles de soprano. Cette étape, je le ressens ainsi, crédibilise la démarche vocale que j'ai entreprise.

Après ma maîtrise de chinois et mon 3e cycle de relations internationales, j’ai travaillé auprès de la direction d’un cabinet d’avocats comme experte de l’Asie, puis pendant 3 ans pour le cabinet d'audit Deloitte. J'avais 24 ans lorsque j'ai commencé le chant, très rapidement, et avec peu de bagages techniques. il s'agissait d'une seconde vie qui répondait à un besoin impératif de subjectif et d'émotion. Une sorte de renaissance attendue et rêvée depuis très longtemps. Le revers de la médaille de ce démarrage très facile a été que, comme tout marchait bien, que les retours sur mes capacités étaient très positifs et que j'étais facilement engagée, je me suis finalement assez peu posé la question du "comment ça marche" alors que, paradoxalement, j'aime bien comprendre comment une langue s'articule pour l'apprendre. Mais j'aspirais tellement à ce changement d'orientation que j'ai fait l'économie de l'acquisition d'un bagage technique solide, et je le regrette aujourd'hui.

Je travaillais à l'époque avec Hubert Weller, l’assistant d'un professeur connu, qui m'a amenée jusqu'au Centre de formation lyrique de l'Opéra national de Paris. Je prenais un cours lorsque mon métier me le permettait et, rapidement, sans que je force ma voix, j'ai convaincu un certain nombre de gens dans le registre de mezzo-soprano. Et c'est ainsi que j'ai fait 12 ans de carrière en tant que mezzo sans que quiconque ou presque s'interroge. Pourtant, je sentais bien que je n'avais pas les moyens de chanter aussi proprement que je le souhaitais, et cela m'a toujours gênée. Au début, tout allait bien mais, rapidement est né un sentiment d'inconfort qui a donné lieu à un sentiment d'illégitimité que je vivais mal. D'autant que j'avais très envie d'une longue carrière susceptible de répondre à ce besoin de scène ressenti très jeune et mis de côté pour diverses raisons. Je ne pouvais donc pas imaginer une trajectoire autrement que sur la durée, tout en chantant le mieux possible.
Ce sentiment d'illégitimité est allé en s'amplifiant au fil des années et, heureusement, j'ai rencontré un certain nombre de chefs d'orchestre, de chefs de chant ou de chanteurs qui me disaient entendre plutôt un "soprano costaud" qu'un véritable "mezzo". Cependant, si j'entendais parfaitement ces réactions, je n'avais pas non plus les moyens qui correspondaient au répertoire de soprano. À cette époque, je n'aurais pas pu tenir ne serait-ce qu'une page dans l'aigu !
Peu de temps après ma première Carmen à l'Opéra de Lausanne, je devais chanter l'œuvre contemporaine de Tobias Picker Thérèse Raquin, au Studio de Covent Garden. Ce rôle était vraiment écrit à la limite des deux tessitures et je me suis dit qu'il me fallait absolument modifier ma technique. C'est là qu'a commencé ce très long processus de complète remise en question de ce que je faisais, et de recherche de gens pouvant m'aider à bâtir un outil. Je ne me suis jamais dit "Je veux chanter soprano !", mais plutôt "Je ne sais pas chanter". Un certain nombre de gens en qui j’avais confiance voyant en moi une soprano, j'ai alors pris la décision de suivre cette orientation et d'acquérir une vraie technique avec l'idée de voir au final ce qu'il en sortirait. Sur les conseils d’Irène Kudela, je me suis adressée à Sylvie Valayre qui, en plus d’avoir fait la remarquable carrière que l’on connaît, est un excellent professeur. C’est à elle que je dois d’avoir pu aborder mes premiers rôles de soprano : Donna Elvira, Tatiana, Madame Lidoine, la Gouvernante et Alice Ford.

J'ai continué à chanter, mais beaucoup moins, car j'ai très vite compris que la bonne direction évoluait vers un répertoire de soprano et qu'il me fallait du temps pour construire de nouvelles bases. Or en chantant comme je le faisais alors, c'est-à-dire en enchaînant sans arrêt, je ne pouvais dégager suffisamment de temps. De plus, je ne pouvais envisager de me diriger vers une Donna Elvira en continuant à chanter des rôles de mezzo qui m'auraient demandé de faire vocalement le grand écart et auraient nui au travail dans lequel je me lançais. J'ai donc choisi de refuser un certain nombre de projets, et même d'en annuler, pour me donner les moyens d'accomplir cette évolution en espérant un jour être crédible.

Entre ma première Donna Elvira et le récent récital Strauss-Wagner à l'Opéra de Tours, mon parcours a bien duré entre 6 et 7 ans. D'abord, j'ai sous-estimé le temps nécessaire à l'élaboration d'un outil vocal solide, et je n'avais pas non plus envisagé que, parallèlement au développement de cet outil, mes moyens allaient se développer à ce point. Je n'imaginais pas au-delà des rôles de Donna Elvira, Tatiana, Madame Lidoine ou de la Gouvernante qui me semblaient déjà formidables. Puis, en cours de travail, en découvrant avec Deborah Polaski une autre approche technique et esthétique, puis en abordant avec elle davantage du répertoire allemand, de nouvelles perspectives se sont ouvertes, qui correspondent bien davantage à ce que j'ai envie de montrer sur scène. Quoi qu'il en soit, ne pensez pas que je m'installe aujourd'hui pour autant dans une sorte de confort car je me dis toujours "Si j'y suis arrivée c'est donc que ce n'était pas grand-chose. Il me faut chercher plus loin…". C'est un moteur de progrès formidable mais pas toujours facile à vivre.

Absolument, mais j'ajouterais que travailler est formidable pour permettre de repousser ses propres limites. Toutefois, à la différence de ce que je pouvais exprimer en 2006, je trouve aujourd'hui que tout ce processus, long, douloureux et accompagné de doutes et de grandes difficultés, en particulier le coup de frein porté à une carrière qui se déroulait harmonieusement, aboutit avec bonheur à ce sentiment très excitant de posséder finalement les moyens de faire ce qui correspond à ce que je suis. Et cela tant sur le plan des rôles qui s'ouvrent à moi que sur le plan vocal. Je me situe aujourd'hui davantage dans la recherche d'une forme d'excès, de l'abyme, des fractures et des brûlures, ce qui correspond à des rôles qui demandent un énorme investissement physique et d'explorer les extrêmes de la voix. C'est ce qui me motive. Tout ce parcours me permet maintenant de commencer à explorer cette direction. Et, pour être honnête, si cette trajectoire devait s'arrêter à ce que symbolise "Frühlingsfeier" de Strauss, alors j'en serais déjà pleinement satisfaite.

Aujourd'hui, oui, car ce que j'ai proposé dernièrement a convaincu. Mais mon évolution a été vue avec beaucoup de doute et de méfiance, ce que je peux très bien comprendre. Après tout, les gens se sont dit : "Mais qu'est-ce qui lui prend ? Encore une mezzo qui, sous prétexte qu'elle a un aigu facile, imagine qu'elle est soprano ! Pourquoi cette lubie alors que sa carrière de mezzo se déroule très bien ?". Je suis consciente que beaucoup ont réagi ainsi, et je ne vous cache pas que je me suis sentie un petit peu seule en même temps qu'il s'agissait d'un bon test de détermination. Fort heureusement, il s'est trouvé quelques personnes, dont plusieurs chefs d'orchestre, pour me faire confiance, à commencer par Benjamin Pionnier qui m'a dirigée dans mon dernier rôle de mezzo dans La Vie parisienne où je chantais Metella alors que je venais d'annoncer mon intention de prendre une nouvelle direction. J'ai retrouvé Benjamin à Hong Kong où je chantais Micaëla dans Carmen, après quoi il m'a invité pour une Donna Elvira dans Don Giovanni, et m'a recommandée à un autre orchestre pour les Quatre derniers Lieder de Strauss après m'avoir entendue dans la Scène finale de Salomé. Il est le premier à m'avoir dit que la direction que j'avais prise était absolument juste. Enfin, c'est lui qui m'a proposé ce concert à Tours afin de me permettre de tester ce répertoire allemand en public et avec un orchestre. Benjamin Pionnier est un des chefs à qui je dois beaucoup.




Il y a aussi Lawrence Foster, qui m'a suivie et soutenue. Lui ne m'avait pas connue comme mezzo et n'a jamais émis le moindre doute sur ma tessiture. J'ai auditionné la première fois pour lui comme soprano pour Falstaff, et il m'a engagée pour le rôle d'Alice au Gulbenkian de Lisbonne. Je me souviens qu'il m'avait dit : "Ce qui est formidable, c'est que vous possédez un médium riche…". Et pour cause ! Nous venons d'ailleurs de faire ensemble L'Heure espagnole, qui était écrit à l'origine pour voix de soprano mais qui est souvent chanté par les mezzos car le rôle de Concepcion est écrit entre les deux registres. Lorsqu'il m'a demandé si j'acceptais, il a eu cette phrase adorable : "Je sais que tu es soprano, mais j'aimerais bien faire ce concert avec toi malgré tout !". Au milieu de mon parcours du combattant, je recevais parfois des propositions pour des rôles de mezzo et mes cheveux se dressaient alors sur ma tête. Mais aujourd'hui, au terme de ce voyage, je sais précisément où je me situe, et si j'estime pouvoir chanter un rôle comme celui-ci et que j'ai envie de le chanter, je ne m'occupe pas de l'étiquette. Cela ne remet aucunement en question mes galons de soprano. Et puis, il y a Colin Davis, dont je garde des souvenirs emplis d’admiration et d’affection. J’ai beaucoup chanté Berlioz avec lui, avec le bonheur que l’on peut imaginer. Quand nous nous sommes retrouvés sur Benvenuto Cellini pour la dernière fois - je chantais Ascanio - il a été le premier à me dire qu’il entendait "une jeune Heldensoprano", selon ses propres termes, et que c’était "very exciting". Je porte toujours le souvenir de ces paroles au fond de moi comme un trésor très précieux. Colin Davis avait eu la gentillesse de me demander de le tenir au courant de mon évolution - ce que j’avais fait après ma première Donna Elvira dont je lui avais envoyé des extraits - et il avait pris le temps de m’écrire pour me donner son avis. Il m’avait alors répondu qu'il me fallait rapidement chanter Alceste et Iphigénie. Je n'ai pas chanté ces rôles, mais ça viendra peut-être…

Très facilement, et je dirais même que chanter Ravel m'a été très utile. Mon nouveau répertoire va clairement tourner soit autour des rôles de soprano dont le médium est très marqué, soit vers des rôles qui sont entre les deux tessitures, ce qui renvoie à certains emplois de mon ancien répertoire que je rechanterai avec grand plaisir. Or, si l'écriture de la Princesse étrangère est chargée en notes aiguës, elle demande aussi un médium très costaud car l'orchestration est très puissante dans cette tranche de la voix. Alors, retrouver Concepcion au milieu de Rusalka a été très salutaire car l'écriture est essentiellement médium. Par ailleurs, si l'orchestre de Ravel n'est pas celui de Dvorak, il demeure assez chargé, ce qui en faisait aussi un bon exercice. Pour autant je suis en ce moment très vigilante à ne pas retomber dans un médium de mezzo assombri, voire trafiqué, qui perd par le fait même en brillance et en efficacité. Je fais donc très attention à ne pas retrouver mon ancienne façon de chanter lorsque l'occasion peut se présenter. À vrai dire, je crois mon émission actuelle bien plus honnête et naturelle qu'autrefois au point de vue de la couleur. Là encore, je pense que parvenir à chanter avec la vraie couleur de sa voix est l'aboutissement d'un profond et long travail personnel…

J'en suis persuadée au point de regretter de ne pas avoir moi-même senti les répercussions physiques liées à ma façon de chanter d'alors. Mais il faut dire que j'ai une résistance fantastique et une santé vocale qui m'a mise à l'abri de nombreux désagréments. La jeunesse des cordes vocales et du corps contribue aussi à remédier rapidement aux écarts des jeunes chanteurs ou à les compenser un certain temps. Par ailleurs, mon répertoire n'était pas un répertoire lourd, mais plutôt central avec des aigus. Si j'avais chanté Amneris, j'aurais sans aucun doute risqué des problèmes vocaux… À l'inverse, je sens aujourd'hui au niveau corporel un vrai confort et une réelle sensation de santé liée au bien-être vocal.

J'aime avant tout la proximité avec le public. Cette expression rejoint mon goût pour communiquer le mot et cette osmose extraordinaire entre la musique et le mot, particulièrement présente dans le récital. J'aime aussi construire un programme avec un pianiste, trouver une cohérence thématique. Mais l'exercice du récital reste beaucoup plus difficile que celui de l'opéra. Il est cependant très important de continuer à le pratiquer, non seulement pour des raisons de santé vocale, mais aussi de travail subtil de l'instrument. À l'opéra, parfois, on se rend compte lorsqu'on se trouve parmi le public que, si la voix est suffisamment grande et la présence suffisamment forte, tout va bien. Mais, pour peu qu'on soit un peu perfectionniste, on ne peut alors s'empêcher de penser qu'au niveau de la qualité de l'émission et de la subtilité des nuances, le récital est tout de même autre chose…
En matière de récital, je pense aujourd'hui me diriger vers un répertoire qui privilégie la mélodie française. Chanter dans sa propre langue permet une approche d'une très grande subtilité. On peut bien sûr entendre des choses de très grande qualité par des chanteurs non-francophones dans le répertoire français, mais cette espèce de magma inconscient qui est le propre de celui qui chante dans sa langue d'origine apporte autre chose… Spontanément, je pourrais aussi aller vers certains Debussy que je n'avais pas abordés auparavant. Mais aussi vers du répertoire allemand car je sens une forte affinité autant avec la diction spécifique de cette langue qu'avec la dimension instrumentale et vocale. J'affectionne aussi particulièrement le tournant du XIXe au XXe siècle. Je pense alors à des Lieder de Zemlinsky et de Berg. Il y a dans la complexité de cette musique et dans son aura décadente des choses qui m'attirent invariablement.

Une rencontre majeure, sans aucun doute. Une rencontre de la première heure puisqu'elle remonte au Centre de formation lyrique de l'Opéra national de Paris où il avait été invité par la directrice Christine Bullin à venir donner des masterclass. Il se trouve qu'on m'a proposé à ce moment-là un récital de mélodies françaises au Japon et la question s'est posée du pianiste avec lequel je partirais. Les séances de travail avec Antoine s'étaient tellement bien passées que je lui ai proposé de m'accompagner. C'était une sorte d'évidence. Antoine m'a beaucoup aidée à apprendre à bâtir un programme et à ouvrir mon horizon de répertoires. Ce récital au Japon a été le début d'une amitié et d'une complicité qui ne se sont jamais démenties. Pourtant, dans un parcours comme le mien, de la même façon que dans une histoire d'amour, il est fréquent de voir les chemins diverger en fonction de la personnalité de chacun. Mais avec Antoine, le temps a passé, nos personnalités ont évolué comme nos perceptions sur nos carrières, et nous nous sommes aperçus que notre lien demeurait aussi puissant. Récemment, nous nous sommes même dit que le désir de nous retrouver en scène après cette longue période d'évolution de chacun était à nouveau très fort. Durant cette période, après avoir porté l'un sur l'autre un regard à la fois bienveillant et critique, nous aimerions aujourd'hui en faire quelque chose sur scène.

Nous avons toujours été vigilants quant à parler de notre couple. En particulier pendant cette période de changement, j'étais moi-même plus discrète sur le sujet car je ne voulais à aucun prix que le manque de crédibilité lié à mon évolution ne rejaillisse sur la carrière de Nikolai. J'ai donc tenu à bien séparer nos deux trajectoires vis-à-vis de la sphère publique et professionnelle. Par ailleurs, à la fois par orgueil et pour ne pas lui nuire, je ne voulais absolument pas bénéficier d'une manière ou d'une autre d'un soutien qui serait venu de l'association de mon nom au sien. Maintenant, ma situation ayant évolué, parler de nous est devenu plus facile…

Vivre avec un chanteur n'est pas du tout un fardeau et nous ne le vivons pas comme une difficulté. De ce point de vue, nous avons conscience de vivre une situation assez rare pour deux chanteurs. Dans notre couple, le fait d'être chanteur tous les deux crée une immense complicité car nous partageons notre passion du chant avec tout ce qu'elle comporte d'exigence, de doutes, et parfois de souffrances et de remises en question. Nous comprenons très bien tout cela chez l'autre, ce qui nous rend à même d'apporter ce dont il peut avoir besoin en termes de regard le plus honnête possible et de critique s'il le faut, tout en sachant que ce regard est profondément bienveillant. Par ailleurs, nous sommes à même de comprendre les besoins quotidiens et affectifs qui se manifestent dans une organisation de vie de chanteurs. Et Dieu sait combien ces animaux ont un besoin disproportionné d'affection ! Il faut bien que des fractures ou même des gouffres poussent un être humain sur scène devant un public ! Alors qui mieux qu'un artiste peut comprendre ce que vit un autre artiste ? Ensuite, et c'est un sentiment que nous constatons jour après jour, nous sommes tous deux extrêmement heureux et fiers des succès de l'autre. Lorsque je suis dans la salle et que je vois Nikolai heureux en scène et face à un public heureux, c'est un bonheur immense pour moi. À l'inverse, je vois bien que c'est la même chose lorsqu'il se trouve dans la salle et que je suis sur scène… Évidemment nous devons faire face à des contraintes d'emploi du temps mais c'est juste une question d'organisation.

Bien sûr, mais nous chantons peu ensemble. Le niveau de carrière de Nikolai correspond à une pression énorme et son répertoire est très exigeant. Dans ces conditions, il est beaucoup plus confortable d'avoir l'autre dans la salle pour écouter et aider en absorbant un peu de pression plutôt que de se retrouver tous les deux sur scène. Mais, pouvoir chanter ensemble de temps en temps, et finalement de plus en plus car mon parcours personnel m'a apporté plus de confort et d'assise, me procure et nous procure maintenant un plaisir de plus en plus grand. Je pense qu'aujourd'hui, il s'agit d'un véritable partenariat. De plus, notre complicité sur scène semble évidente. Nikolai et moi en avons bien sûr conscience, mais il y a manifestement autre chose que les gens captent et que nous ne contrôlons pas. Par exemple, dans le duo de La Walkyrie, nous avons été surpris et même heureux de la manière dont les gens nous ont témoigné de cette dimension qui dépasse le bien chanter et donne vie d'une façon assez spéciale à l'histoire d'amour qui est représentée. C'est sans doute là ce que peut apporter un couple soudé comme le nôtre à une scène comme celle-ci.

Absolument. En effet, j’ai commencé à chanter, portée par l’intime et très forte conviction que c’était pour moi la plus "juste" façon de m’exprimer, d’être au monde. À l'époque j'avais déjà le sentiment, peut-être imprécis, que les caractères assez forts, voire excessifs, étaient ceux que j'avais envie d'incarner. Je sentais que mes premières émotions musicales me porteraient vers ces personnages. Je me souviens d’avoir été bouleversée la première fois que j'ai vu et entendu Salomé. De même, j'ai pris un énorme coup de poing dans les entrailles quand j'ai découvert Wozzeck. J'ai vu pour la première fois Parsifal au Met alors que j'étais adolescente dans le cadre d'un échange scolaire et cette représentation a été une révélation… Je fais partie d'une famille de musiciens sur plusieurs générations et sans doute la musique m'a-t-elle rattrapée. Disons que je me suis trouvée en terrain favorable…

Je ne tarderai pas à me replonger dans Eugène Onéguine car je chanterai Tatiana à L'Opéra de Metz début février 2018. Je travaille également Salomé, comme vous vous en doutez, mais aussi Sieglinde et Kundry, un autre personnage qui ne manque pas non plus de complexité. Isolde et Kostelnicka sont au programme - et quel programme enthousiasmant ! - de mes prochaines séances de travail avec Deborah. Je pense aussi à Didon qui, là encore, comblerait mon goût pour l’excès… Après avoir chanté Béatrice et Benedict, La Damnation de Faust, Benvenuto Cellini, Roméo et Juliette et Ascagne dans Les Troyens, j'aimerais m'atteler au rôle de Cassandre. Il y a quelques jours, nous en parlions avec Lawrence Foster qui me disait que j’étais une Cassandre. C’est aussi ce que m’avait dit John Nelson la dernière fois que je lui ai demandé de m’écouter, alors que j'étais encore en phase de transition de tessiture. Quand j’ai avoué à Lawrence Foster que j’en rêvais et que je pouvais même imaginer de chanter à la fois Cassandre et Didon, il m’a répondu qu’il n’avait jamais été très convaincu de l’intérêt de confier les deux rôles à la même chanteuse. Il m’a ensuite demandé pourquoi un tel souhait. J’aurais alors pu lui faire la réponse pleine d’humour de Deborah Polaski lorsque nous en avons parlé : "because you can!". Mais j’ai tout simplement répondu à Lawrence Foster en riant que, parmi les raisons qui me font tant aimer la musique de Berlioz, il y a sa dimension mégalomaniaque, ce sens de l’excès que je porte incontestablement en moi, aussi insoupçonnable soit-il lorsque je ne suis pas sur la scène…

Interview mit Isabelle Cals, Sopranistin

Tutti-magazine Als wir Isabelle Cals auf der Bühne der Oper in Tours im halsbrecherischen Orchesterlied „Frühlingsfeier“ von Richard Strauss hören konnten, waren wir sprachlos vor Staunen über Ihre Hochtöne, die sie wie expressive, glühende Pfeile übers Orchester schleuderte, das im vollen Forte spielte. Diese stimmliche Mühelosigkeit in den hohen Lagen um die sie so manche Sopranistin beneiden würde, hat sich anschließend in ihrer „Sieglinde“ an der Seite eines sensiblen und menschlichen „Siegmund“ von Nikolai Schukoff bestätigt. Wenige Wochen später hörten wir Isabelle Cals erneut, diesmal in der Rolle der Fremden Fürstin in Rusalka, der sie sowohl eine tänzerische Anmut als auch eine stimmliche Wucht, gefärbt vom düsteren Rollencharakter einhauchte.

Isabelle Cals Ich habe normalerweise eine ausgeprägten Hang zur Selbstkritik - mich darauf zu konzentrieren, womit ich nicht zufrieden bin, um verbessern zu können, was verbessert werden muss, aber ich muss zugeben, dass ich heute, am Tag nach der Premiere, zufrieden bin. Dies Rolle stellt einen wichtigen Schritt in punkto Repertoire für mich dar. Sie gemeistert zu haben, bringt mir anscheinend die Anerkennung und Bestätigung, dass meine momentanen stimmlichen Mittel dieser Art von Repertoire entsprechen. Außerdem macht mir die Rolle der fremden Fürstin großen Spaß. Auch in punkto Temperament ist dieses Rollenfach ziemlich neu für mich, und viele sind überrascht, da ich gewöhnlich keine Bösewichte verkörpere. Aber finde das faszinierend, da man durch Spiel in einen entfesselten Zustand versetzt wird. Solch eine Frauenfigur zu verkörpern ist sehr befreiend.

Das hängt zuerst von den stimmtechnischen Möglichkeiten und der stimmlichen Entwicklung ab, aber die exzessiven Figuren reizen mich am meisten. Es fällt mir leichter diese interessant zu gestalten, als weniger starke Charaktere. Mir ist das schon seit einer Weile bewusst, denn die Rollen, die mich in dieser Art und Weise fasziniert haben und in denen ich offenbar auch am meisten überzeugen konnte, waren Mélisande – ganz am Anfang meiner Karriere, Giulietta in Hoffmanns Erzählungen - ein bisschen weniger prägnant, da die Rolle nicht lange ist, und dann natürlich die Gouvernante in Turn of the Screw. Ich liebe es, diese Rolle zu singen und ich hoffe, dass noch einige andere starke Frauenrollen folgen werden...

Ich glaube, dass die Eigendynamik einer Rolle eine starke Reaktion des psychologischen Antriebs provoziert, die sich wiederum in der Körpersprache wiederspiegelt und somit Ausdrucksmittel bereitstellt, die man in anderen Rollen vielleicht nicht gleich zu Verfügung hätte. Allerdings kann man mit der psychologischen Herangehensweise nicht alles bewältigen. Mir ist schon vorgekommen, dass mich eine wahre Leidenschaft für eine Rolle gepackt hat, die aber nicht meinem Stimmfach entsprach und die psychologischen Triebkräfte reichten nicht aus, um mir die stimmlich erforderlichen Mittel bereitzustellen! Ich zweifle jedoch keinesfalls, dass die Kraft bestimmter Rollen, die richtigen körperlichen und stimmlichen Reaktionen auslösen kann.

Rusalka ist meine erste komplette Oper auf Tschechisch, aber während meiner Suche nach neuem Repertoire hatte ich die Gelegenheit mehrere Arien in dieser Sprache zu erarbeiten. Ich glaube übrigens nicht, dass es für mich einen Unterschied macht eine Rolle auf Tschechisch zu erlernen, oder auf irgend einer anderen Fremdsprache. Beim Rollenstudium ist mein erster Schritt normalerweise, dass ich mir das L’Avant Scène (franz. Opernführer in Heftform) zur Oper besorge, um mir einen Zugang zum Werk zu erschließen und mich mit dem Libretto vertraut zu machen, das ich mithilfe eines Wörterbuches zu verstehen versuche. Dann beginne ich mit der Aussprache und da der Text auf Tschechisch ist, bitte ich wie immer Irene Kudela mir zu helfen. Sie ist wahnsinnig nett und hat ein sehr gutes Ohr und eine sehr feinsinnige Wahrnehmungsgabe für die Psychologie der Menschen. Man kann sich also keine besseren Voraussetzungen wünschen. Wir konzentrieren uns nun zusammen auf den Text und sie passt auf, dass ich den richtigen Sinn der Worte verstehe, während sie mir zeigt wie man sie ausspricht. Dann arbeite ich zu Hause und nachdem ich die Musik unter die Wörter gelegt habe und anfange beides zu beherrschen, gehe ich wieder zu Irene, um mit ihr an der Rolle zu arbeiten.

Nicht wirklich. Ich habe beim Chinesisch-Studium, wie beim Erlernen anderer Fremdsprachen, eher festgestellt, dass ich das Glück habe, ein gutes Gehör zu besitzen, das mir das Lernen erleichtert. Dank dieses Gehörs konnte ich Chinesisch lernen und es hilft mir, nicht zu viel Zeit zu verlieren, wenn ich eine Rolle auf Tschechisch, oder zum Beispiel Russisch erarbeite. Ich habe festgestellt, dass mein Gehör auf zwei Ebenen funktioniert: mein Gehör erkennt zweifelsohne sehr gut die Sprachmelodie, gleichzeitig visualisiere ich sehr präzise die Seiten meines Klavierauszugs mit allen meinen Anmerkungen und Notizen. Die auditive und visuelle Herangehensweise gehen also Hand in Hand. Im Endeffekt merke ich mir alles anhand des Sinns der Handlung. Wenn ich in der letzten Minute etwas in einer Sprache lernen soll, die ich nicht spreche und auch nicht spontan verstehe, ist das Auswendiglernen viel komplizierter. Die Verflechtung zwischen Wort und Musik ist für mich extrem wichtig. Wenn ich zum Beispiel sage, dass ich diese oder jene Rolle gerne spiele, bezieht es sich vor allem auf diese Korrelation.

Diese Zusammenarbeit war sehr angenehm, denn der Regisseur war sehr offen für meine Vorschläge. Ich muss zugeben, dass ich diese Arbeitsweise sehr schätze, denn – auch wenn man das gute Auge eines Regisseurs braucht, wie auch die Stimme das Ohr eines Außenstehenden – komme ich zu den Proben mit Bildern, Gesten, ja manchmal Ausdrucksweisen, die sich für mich logisch aus der Arbeit mit Text und Melodie erschließen. Interessanterweise treffen diese Ideen, wenn ich sie in den Proben vorbringe, sofort auf spontane Zustimmung des Regisseurs. Natürlich muss sich diese Interpretationsidee dem Regiekonzept unterordnen. Im Falle der Fremden Fürstin hatte ich mir zum Beispiel eher ein gemeine, hinterhältige Hydra vorgestellt, als eine Furie, die sich durch offene Gewalt ausdrückt. In diesem Sinne hatte ich auch mit Irene Kudela gearbeitet. Umso mehr, als es unumgänglich ist, sobald man das dramatischere Repertoire singt, den übermäßigen körperlichen Einsatz zu kontrollieren, da er sich kontraproduktiv auswirkt. Das ist für Anfänger schwer zu verstehen, und deswegen raten die Gesangsprofessoren auch abzuwarten: Eine dramatische Rolle erfordert viel Erfahrung im Bereich der Körperbeherrschung und dem Kräftehaushalt… Dieter Kaegi hat sich allem sehr offen gezeigt und hat meine Vorschläge sehr gut angenommen und nach zahlreichem Gedankenaustausch kamen wir auf harmonische Weise in der Inszenierung voran.

Als wir anfingen das Konzertprogramm mit Benjamin Pionnier zu planen, haben wir uns gegenseitig Vorschläge gemacht. Da habe ich mich für dieses Orchesterlied entschieden, weil ich so davon begeistert war, als ich es zum ersten Mal gehört hatte. Aus „Frühlingsfeier sprudelt ein unglaubliches Temperament, das ich, aus musikalischer und intellektueller Sicht, am ehesten mit Salome vergleichen kann. Zumal Salome eine meiner Traumrollen ist. Auf den Rat meiner jetzigen Gesangslehrerin hin und dank des Pianisten Jean-Marc Bouget hatte ich schon die Gelegenheit gehabt die Schlussszene von Salome ganz diskret im Rahmen eines Festivals auszuprobieren. Es ist wirklich gut gelaufen, so gut, dass nach dem Konzert einige Opernliebhaber und -kenner zu mir gekommen sind, um mich zu beglückwünschen, nachdem sie mir gestanden hatten, dass ihre erste Reaktion beim Durchlesen des Programmes war: Ganz schön dreist, sich an dieses Repertoire heranzuwagen... „Frühlingsfeier“ war nun also die Gelegenheit dieses Repertoire in „voller Bandbreite“ zu testen - auf der Bühne und mit großem Orchester. Ich erinnere mich noch an den Tag als ich mit dem Lied zu Deborah kam, denn ihre spontane Reaktion war: „wer hat das denn ausgesucht...?“. Und nach kurzem Zögern habe ich zugegeben: „Ich!“ In der Tat habe ich mich bei diesem Lied beim Konzert in Tours am wohlsten gefühlt, sicherlich weil es in mir eine Energie freisetzt, die meiner Lust entspricht, diese Art von musikalischer Schreibweise zu gestalten. So wunderlich das auch scheinen mag : Ich hatte keinerlei Bedenken, zumal ich mich auf eine sehr tragende Orchesterbegleitung stützen konnte, ganz anders als bei den Proben mit Klavier. Um ehrlich zu sein, habe ich mich damals gefragt, ob man mich überhaupt hören würde, da das Orchester in Tours mit auf der Bühne war. Aber es ist mir klar, dass ich mich an einem Punkt meiner Karriere befinde, wo ein Auftritt dieser Art, als ein Beweis gilt. Da ich aus dem Mezzo-Fach komme, ist es wichtig, mich in einem Stück zu präsentieren, das meine stimmlichen Fähigkeiten zeigt.

Eine Visitenkarte wäre eher eine Opernrolle, auch wenn dieses Lied zweifelsohne eine theatralische Dimension besitzt. Nun ja, warum eigentlich nicht, wenn man zuvor die Gründe für diese Wahl erklärt hat? Es fasst ja zudem sehr gut meine aktuellen stimmlichen Möglichkeiten zusammen. Ich weiß übrigens genau, dass ich es niemals hätte singen können, als ich noch Mezzo war… Das Konzert in Tours hat in dieser Hinsicht eine wichtige symbolische Bedeutung und kennzeichnet den Abschluss einer sehr langen Übergangsphase, die sehr viel länger war, als ich mir vorgestellt hatte, denn es ist jetzt schon 6 Jahre her, dass ich meine ersten Sopran-Rollen gesungen habe. Diese Etappe, und das spüre ich, macht den stimmlichen Weg, den ich eingeschlagen habe, glaubwürdig.

Nach Abschluss des Chinesisch-Studiums und meines Aufbaustudiums im Bereich der Internationalen Beziehungen, habe ich in der Leitung einer Anwaltskanzlei als Asienexpertin und danach 3 Jahre lang für die Wirtschaftsprüfungskanzlei Deloitte gearbeitet. Als ich dann angefangen habe zu singen, war ich 24 Jahre alt. Es ging alles sehr schnell und ich hatte kaum gesangstechnische Kenntnisse. Es war wie ein zweites Leben, geboren aus einem dringenden Wunsch nach Subjektivität und Gefühlen. Eine Art Wiedergeburt, die ich seit langem erwartet und erträumt hatte. Die Kehrseite der Medaille dieses fast zu einfachen Blitzstarts war, dass ich mir – weil ja alles so gut lief und das Feedback über meine Leistungen sehr positiv war und ich leicht Engagements fand – letztendlich wenig Fragen darüber stellte: „wie das eigentlich funktioniert“, obwohl es mir bei Sprachen, paradoxerweise, sehr wichtig ist zu wissen, wie man sie genau artikuliert, um sie zu lernen. Aber ich hatte mich so nach dieser Neuorientierung gesehnt, dass ich es mir damals erspart habe, mir eine solide Gesangstechnik anzueignen – und das bereue ich heute.

JIch habe zu damals mit Hubert Weller gearbeitet, dem Assistenten eines bekannten Gesangslehrers, der mich bis zum Centre de formation lyrique der Opéra de Paris (Opernstudio der Pariser Oper) begleitet hat. Ich nahm damals Gesangsstunden, wenn meine Büroarbeit es mir erlaubte und ich habe ziemlich schnell, ohne meiner Stimme Gewalt anzutun, nicht wenige Leute als Mezzo-Sopranistin überzeugt. Und so kam es , dass ich 12 Jahre lang eine gute Karriere als Mezzo machte, ohne dass sich jemand (oder beinahe niemand) die geringste Frage stellte. Und trotzdem spürte ich wohl, dass ich nicht in Lage war, so zu singen, wie ich es gewollt hätte und das hat mich immer gestört. Am Anfang ging alles gut, aber dann kam ziemlich schnell ein unbehagliches Gefühl auf, das zu einem Gefühl der Illegitimität wurde und mir das Leben schwer machte. Dazu kommt, dass ich große Lust auf eine lange Karriere hatte, die mein Bühnen-Bedürfnis stillen sollte, das ich schon als junges Mädchen gespürt, aber aus verschiedenen Gründen beiseite geschoben hatte. Ich konnte mir also nur eine langjährige Laufbahn vorstellen und dabei so gut zu singen wie möglich.
Dieses Gefühl der Illegitimität wurde im Laufe der Jahre immer stärker und ich habe glücklicherweise eine Reihe von Dirigenten, Korrepetitoren und Sängern kennengelernt, die in mir eher einen « kräftigen Sopran » als einen „richtigen Mezzo“ hörten. Jedoch hatte ich, auch wenn ich diese Reaktionen absolut nachvollziehen konnte, nicht die stimmtechnischen Möglichkeiten, die ein Sopran-Repertoire erforderte. Zu dieser Zeit hätte ich nicht eine einzige Seite eines Klavierauszugs als Sopran durchgehalten! Kurz nach meiner Premiere von Carmen an der Oper Lausanne hatte ich einen Vertrag für das zeitgenössische Werk Thérèse Raquin von Tobias Picker im kleinen Saal von Covent Garden. Diese Rolle war wirklich als Grenzpartie zwischen beiden Stimmlagen komponiert und ich habe mir gesagt, dass ich unbedingt etwas an meiner Technik ändern müsse. Zu diesem Zeitpunkt begann der sehr langen Prozess alles komplett in Frage zu stellen und ich habe mich auf die Suche nach Leuten gemacht, die mir dabei helfen könnten mein Handwerk zu erlernen. Ich habe mir nie gesagt: „Ich will als Sopran singen!“, sondern eher „ich weiß nicht, wie man richtig singt“. Eine Reihe von Leuten, denen ich vertraue, sahen in mir einen Sopran und so traf ich die Entscheidung in diese Richtung zu gehen, mir eine profunde Gesangstechnik anzueignen und am Ende zu schauen, was dabei herauskommt. Auf den Rat von Irène Kudela hin habe ich mich an Sylvie Valayre gewandt, die nicht nur eine bemerkenswerte Karriere gemacht hat, wie man weiß, sondern auch eine ausgezeichnete Pädagogin ist. Ihr verdanke ich meine ersten Sopranrollendebüts: Donna Elvira, Tatiana, Madame Lidoine, die Governess und Alice Ford.

Ich habe weitergesungen, aber weniger als vorher, da ich bald realisierte, dass der richtige Weg zum Repertoire eines Soprans führte und dass ich Zeit brauchte, um eine neue Basis zu schaffen. So wie ich damals allerdings arbeitete, nämlich pausenlos, ein Projekt nach dem anderen, konnte ich nicht genug Zeit finden. Außerdem konnte ich keine Donna Elvira in der Sopranversion) in Angriff nehmen und gleichzeitig weiter Mezzo-Rollen singen, die einen stimmlichen Spagat von mir verlangt und der Arbeit, in die ich mich gestürzt hatte, geschadet hätten. Ich habe also beschlossen, eine gewisse Anzahl von Projekten abzulehnen oder sogar abzusagen, um mir die Möglichkeit zu geben, diesen Wechsel erfolgreich zu absolvieren und eines Tages – als Sopran - glaubwürdig zu sein.

EZwischen meiner ersten Donna Elvira und dem kürzlichen Strauss-Wagner-Abend an der Oper in Tours liegen gut 6 bis 7 Jahre. Zuerst habe ich die Zeit unterschätzt, die man benötigt, um sich ein solides Stimmwerkzeug zu erarbeiten. Und ich hatte auch nicht erwartet, dass sich meine stimmlichen Möglichkeiten während dieser Arbeit so stark entwickeln würden. Donna Elvira, Tatiana, Madame Lidoine oder die Governess bedeuteten für mich schon einen wunderbaren Fortschritt. Und dann, im Laufe der Arbeit mit Deborah Polaski, durch die ich nun einen neuen gesangstechnischen und ästhetischen Zugang kennen lernen durfte, und die mir auch das Deutsche Repertoire näher brachte, haben sich neue Perspektiven geöffnet, die viel mehr dem entsprechen, was ich auf der Bühne zeigen will. Wie auch immer, glauben Sie nur nicht, dass ich mich jetzt bequem zurücklehne, denn ich sage mir immer: « Wenn ich das geschafft habe, dann kann es nicht so schwierig gewesen sein. Ich muss also noch weiter suchen… ». Das ist eine wunderbare Antriebsfeder, durch die man gut voran kommt, aber man macht sich das Leben damit nicht immer einfach.

Durchaus, aber ich würde jetzt hinzufügen, dass die stete Arbeit ein großartiges Mittel ist, seine eigenen Grenzen zu erweitern. Indessen finde ich im Gegensatz zu dem, was ich 2006 von mir sagen konnte, dass dieser ganze Entwicklungsprozess – lang, anstrengend, schmerzlich und begleitet von Zweifeln und großen Schwierigkeiten, im Besonderen dem Stagnieren einer bis dahin harmonisch verlaufenden Karriere – nun glücklich in diesem euphorischen Bewusstsein mündet, endlich das Rüstzeug zu besitzen, um das tun zu können, was meiner eigenen Persönlichkeit entspricht. Und dies sowohl was die Rollen betrifft, die sich mir nun erschließen, als auch den puren Gesang. Ich bin heute eher auf der Suche nach Exzess, nach Abgründen, Rissen, Versehrungen, alles Zustände, die Rollen entsprechen, welche einen enormen körperlichen Einsatz verlangen und die einen fordern, die Extreme der Stimme auszuloten. Das ist es, was mich motiviert. Dies alles ermöglicht mir nun, in diese Richtung vorzustoßen. Und, um ehrlich zu sein, wenn diese Entwicklung nun mit dem enden sollte, was die „Frühlingsfeier“ von R. Strauss symbolisiert, wäre ich schon vollauf zufrieden.

Heute ja, weil das, was ich in letzter Zeit gezeigt habe, überzeugt hat. Aber meine Entwicklung wurde mit sehr viel Zweifel und Misstrauen bedacht, was ich gut verstehen kann. Die Leute haben sich eben gesagt: „Was ist denn in die gefahren? Schon wieder ein Mezzo, der glaubt, dass er Sopran ist, nur weil er mühelose Hochtöne hat! Woher kommt diese Schnapsidee, wo doch ihre Karriere als Mezzo wunderbar läuft?“ Es ist mir klar, dass viele Leute so reagiert haben, und ich muss zugeben, dass ich mich ein wenig allein gefühlt habe, wenn es auch gleichzeitig eine gute Probe für meine Entschlossenheit war.
Glücklicherweise gab es auch ein paar Menschen, darunter mehrere Dirigenten, die an mich geglaubt haben; angefangen bei Benjamin Pionnier, der mich in meiner letzten Mezzo-Rolle in La Vie parisienne dirigiert hat, wo ich Metella gesungen habe, obwohl ich gerade meinen Wunsch zum Fachwechsel angekündigt hatte. Ich habe mit Benjamin dann in Hong-Kong zusammengearbeitet, wo ich die Micaela in Carmen sang, worauf er mich dann für eine Donna Elvira in Don Giovanni eingeladen hat. Und nachdem er mich in der Schlussszene von Salome gehört hatte, empfahl er mich einem anderen Orchester für die Vier letzten Lieder von R. Strauss.
Er war der Erste, der mir gesagt hat, dass ich die völlig richtige Richtung eingeschlagen habe. Schlussendlich war es auch er, der mir das Konzert in Tours angeboten hat, um mir die Möglichkeit zu geben, dieses deutsche Repertoire vor Publikum und mit Orchester auszuprobieren. Benjamin Pionnier gehört zu den Dirigenten, denen ich sehr viel verdanke.




Dann ist da Lawrence Foster, der meinen Weg begleitet und mich unterstützt hat. Er hatte mich nie nicht als Mezzo gehört und hat nicht den geringsten Zweifel an meiner Stimmlage geäußert. Ich habe ihm als Sopran zum ersten Mal für Falstaff vorgesungen und er hat mich für die Rolle von Alice mit dem Gulbenkian-Orchester von Lissabon engagiert. Ich kann mich noch erinnern, dass er gesagt hat: „Es ist toll, dass Sie ein so volles mittleres Register haben…“ und er hatte guten Grund dazu! Wir haben übrigens gerade gemeinsam L’Heure espagnole gemacht, eine Oper, die ursprünglich für Sopran geschrieben wurde, die aber oft von Mezzosopranen gesungen wird, da die Partie der Concepcion zwischen beiden Registern liegt. Als er mir die Rolle angeboten hat, sagte er mir diesen wunderbaren Satz: „Ich weiß schon, Du bist Sopran , aber ich möchte das Konzert mit Dir machen, trotz allem.“ Als ich mitten in meinem Hindernisparcours steckte, habe ich manchmal Angebote für Mezzo-Rollen bekommen und dann standen mir die Haare zu Berge. Aber heute, am Ende dieser langen Reise, weiß ich genau, wo ich mich befinde und wenn ich glaube, dass ich eine Partie singen kann und auch noch Lust dazu habe, kümmert es mich wenig, welche Etikette sie trägt. Das stellt meinen Status als Sopranistin nicht in Frage.
Und dann war da natürlich Colin Davis, an den ich mich voller Bewunderung und Zuneigung erinnere. Mit ihm habe ich viel Berlioz gesungen – Momente des höchsten Glücks, wie man sich leicht vorstellen kann. Als wir uns zum letzten Mal für Benvenuto Cellini begegnet sind – ich sang die Rolle des Ascanio – war er der Erste, der mir sagte, dass er in mir einen „jungen Heldensopran“ hörte, wie er sich ausdrückte, und dass er das „very exciting“ fand. Die Erinnerung an diese Worte trage ich tief in mir, wie einen wertvollen Schatz. Colin Davis war so liebenswert, mich darum zu bitten, ihn über meine Entwicklung auf dem Laufenden zu halten – was ich auch gemacht und ihm nach meiner ersten Donna Elvira Aufnahmen davon geschickt habe – und er hat sich die Zeit genommen, mir zu schreiben und mir seine Meinung zu geben. Er hat mir damals geantwortet, dass ich sobald als möglich Alceste und Iphigenie singen sollte. Ich habe diese Rollen noch nicht gesungen, aber wer weiß…

Sehr leicht, und ich würde sogar sagen, dass es mir viel gebracht hat den Ravel zu singen. Mein neues Repertoire wird sich eindeutig entweder um Sopranrollen drehen, deren mittleres Register sehr ausgeprägt ist, oder um Rollen, die sich zwischen den beiden Stimmlagen befinden, den sogenannten Zwischenfachpartien, was mich erneut zu Rollen aus meinem alten Repertoire bringt und die ich mit großer Freude wieder singen werde. Auch wenn die Lage der Fremden Fürstin gespickt ist mit hohen Tönen, verlangt sie trotzdem ein kräftiges Mittelregister, da die Orchestrierung dicht ist in dieser Lage der Stimme. Also habe ich davon profitiert, während der Produktion von Rusalka die Concepcion zu singen, da sie hauptsächlich im Mittelregister liegt. Auch wenn die Orchestrierung von Ravel nicht mit der von Dvorak vergleichbar ist, bleibt sie dennoch ziemlich dick und insofern war es eine gute Übung für mich. Dennoch passe ich im Moment ungemein auf, nicht in ein „gemachtes“ abgedunkeltes Mittelregister eines Mezzos zu rutschen, das dadurch an Strahl und Durchschlagskraft verliert. Ich gebe also sehr acht, wenn ich Gefahr laufe, in meine früheren stimmlichen Reflexe zu verfallen. In facto glaube ich, dass ich jetzt viel natürlicher und ehrlicher singe was mein Timbre betrifft. Ich bin fest davon überzeugt, dass es das Ergebnis eines tiefgreifenden Selbstfindungsprozesses ist, wenn man es schafft, mit seiner eigenen natürlichen Stimme zu singen...

Davon bin ich überzeugt und ich bedaure sogar, dass ich nicht selbst die körperlichen Auswirkungen meiner damaligen Stimmtechnik gespürt habe. Aber ich muss sagen, dass ich sehr zäh bin und eine große stimmliche Ausdauer habe und das hat mich vor vielen Unannehmlichkeiten bewahrt. Die Jugend der Stimmbänder und des Körpers tragen mit dazu bei, dass stimmliche Fehltritte von jungen Sängern leicht überwunden, oder eine Zeitlang kompensiert werden. Außerdem sang ich damals kein dramatisches Repertoire - es war eher zentral mit Hochtönen. Wenn ich Amneris gesungen hätte, hätte ich zweifelsohne mit Stimmproblemen rechnen müssen... Umgekehrt fühle ich mich heute körperlich topfit und kerngesund dank meiner Stimmhygiene.

Vor allem gefällt mir die Nähe zum Publikum. Diese Gattung entspricht meiner Vorliebe dafür, den Wortsinn zu vermitteln, und diese Osmose zwischen Wort und Musik ist bei einem Liederabend natürlich omnipräsent. Ich liebe es mit meinem Pianisten Programme zu entwerfen, die einen guten thematischen Aufbau haben. Die Ausführung eines Liederabends ist übrigens weitaus schwieriger, als die eines Opernabends. Trotzdem halte ich es für wichtig, regelmäßig Liederabende zu geben, nicht nur wegen der Gesundheit der Stimme, sondern auch, weil man mit seinem Instrument dabei subtiler arbeiten muss. Oft stellt man in der Oper, wenn man vor dem Publikum steht, fest, dass es schon ausreicht, wenn die Stimme groß genug ist und die Bühnenpräsenz stark. Aber wenn man, wie ich, zu einem gewissen Grad Perfektionist ist, muss man sich schnell eingestehen, dass in punkto Klangschönheit und feinen Nuancen ein Liederabend schon noch ganz was anderes ist... Was die Programmgestaltung betrifft, tendiere ich heute dazu, den Schwerpunkt auf das französische Liedrepertoire zu legen. In seiner eigenen Sprache zu singen, ermöglicht einen viel tieferen und feineren Zugang. Natürlich wird man auch von nicht französischsprachigen Sängern qualitativ Hochwertiges im französischen Repertoire hören, aber dieses „unterbewusste Magma“ das in dem Sänger brodelt, der in seiner eigenen Sprache singt, bewirkt eben diesen feinen Unterschied... Spontan fallen mir jetzt einige Lieder von Debussy ein, die ich noch nicht gesungen habe.
Ich spüre allerdings auch eine starke Affinität zum deutschen Repertoire, nicht nur wegen seiner sehr spezifischen Aussprache, sondern auch wegen der vokalen und instrumentalen Eigenarten. Weiters habe ich eine besondere Vorliebe für die Musik des „fin de sciècle“. Ich denke da im Speziellen an Lieder von Zemlinsky und Berg. Es gibt etwas in der Komplexität dieser Musik und in dieser dekadenten Atmosphäre, das mich unwiderstehlich anzieht.

Ein Zusammentreffen, von großer Bedeutung. Wir kennen uns aus meinen Anfängen, noch aus der Zeit am Centre de formation lyrique – dem Opernstudio der Pariser Oper – wo er von der Direktorin Christin Bullin eingeladen worden war Meisterkurse zu geben. Rein zufällig hat man mir zu diesem Zeitpunkt einen Liederabend mit französischen Liedern in Japan angeboten und ich war auf der Suche nach einem Pianisten dafür. Die Arbeit mit Antoine hatte so Spaß gemacht, dass ich ihn gefragt habe, mich zu begleiten. Es hätte nicht anders sein können. Antoine hat mir viel dabei geholfen, wie man ein Konzertprogramm gestaltet und er hat meinen Horizont in punkto Repertoire sehr erweitert. Dieser Liederabend in Japan war der Beginn einer langen Freundschaft; wir verstehen uns prima und das hat sich bis jetzt nicht geändert. Natürlich kommt es bei einer künstlerischen Zusammenarbeit – wie bei einer Liebesgeschichte – vor, dass man verschiedene Wege geht, ganz nach unterschiedlicher Persönlichkeit. Wir haben uns mit der Zeit zwar verändert, Antoine und ich, wie auch die Sichtweise unserer Karrieren anders geworden ist, aber wir haben festgestellt, dass wir uns noch genauso stark miteinander verbunden fühlen. Vor Kurzem haben wir uns sogar gesagt, dass wir wieder große Lust darauf haben, nach dieser langen Entwicklungsphase gemeinsam auf der Bühne zu stehen. Wir wollen aus dieser Periode, in der wir uns mit Lob und Kritik zur Seite gestanden haben, gemeinsam etwas machen und es auf die Bühne bringen.

Wir haben immer sehr darauf geachtet, wen wir in unsere Beziehung eingeweiht haben. Vor allem während meines Fachwechsels war ich besonders vorsichtig, was dieses Thema betrifft, weil ich auf gar keinen Fall riskieren wollte, dass die Zweifel der Leute an meiner Entwicklung sich negativ auf die Karriere von Nikolai auswirken könnten. Ich habe also darauf bestanden, unsere beiden Karrieren im öffentlichen wie im professionellen Bereich eindeutig zu trennen. Außerdem wollte ich - einerseits aus Stolz und andererseits, um ihm nicht zu schaden - auf keinen Fall irgendeine Unterstützung, nur, weil man unsere Namen in Verbindung gebracht hatte. Heute, wo sich meine Situation verändert hat, ist es einfacher geworden, über uns beide zu sprechen… Sehen Sie: einem Sänger zusammen leben, ist überhaupt keine Belastung und wir empfinden es gar nicht als schwierig. Das dies allerdings sehr selten für ein Sängerpaar ist, dessen sind wir uns bewusst. Das Faktum, dass wir beide Sänger sind, bewirkt bei uns, dass wir uns ungemein verbunden und nahe sind, da wir dieselbe Leidenschaft für den Gesang teilen, mit allem, was diese mit sich bringt: der hohe Anspruch an sich selber, die Zweifel und manchmal auch die qualvollen und schwierigen Momente, in denen man sich in Frage stellt.

All das sehen und verstehen wir sehr gut beim Anderen, daher fällt es uns leicht dem Partner das zu geben, was er braucht : Ehrlichkeit und - wenn es sein muss - Kritik, in dem Bewusstsein, dass man sie mit tiefen Respekt und Zueignung ausspricht. Außerdem kennen wir sie sehr gut, die Bedürfnisse, vor allem nach Zuneigung und Wärme, die sich in so einem Sängeralltag einstellen. Und Gott allein weiß, wie übermäßig viel Zuwendung so ein Bühnentier braucht! Vergessen wir nicht, dass es oft die seelischen Narben, ja die inneren Abgründe sind, die einen dazu bringen sich auf die Bühne und vor ein Publikum zu stellen! Wer könnte also besser verstehen, was ein Künstler durchmacht, als ein anderer Künstler ? Hinzu kommt, und das stellen wir täglich neu fest, dass der Erfolg des Anderen uns glücklich macht und mit Stolz erfüllt. Wenn ich im Saal sitze und Nikolai glücklich auf der Bühne vor einem genauso glücklichen Publikum sehe, macht mir das eine Riesenfreude. Umgekehrt sehe ich, dass für ihn das Gleiche gilt, wenn ich auf der Bühne stehe... Natürlich hat jeder seine Verpflichtungen aber im Endeffekt ist es nur eine Frage der Organisation.

Natürlich, aber wir singen selten zusammen. Das Niveau, auf der sich Nikolais Karriere befindet, bringt einen enormen Leistungsdruck mit sich, und sein Repertoire ist sehr anspruchsvoll. Unter diesen Bedingungen ist es sehr viel angenehmer, den Anderen im Publikum zu wissen, damit er zuhören und helfen kann, indem er ein bisschen von diesem Druck abbaut, anstatt dass beide auf der Bühne stehen. Aber dank des Fortschritts, den ich gemacht habe und der mir nicht nur ein Gefühl der Sicherheit, sondern auch ein solides Fundament beschert hat, singen wir immer öfter zusammen, was mir - bessergesagt uns - ein immer größeres Vergnügen bereitet. Man könnte sagen, dass es sich heute um eine echte Partnerschaft handelt – im wahrsten Sinne des Wortes. Zudem wirkt das starke Band zwischen uns auf der Bühne ganz selbstverständlich. Wir sind uns dessen natürlich bewusst, aber es entsteht da noch etwas Anderes, was die Leute ergreift und das wir nicht bewusst kontrollieren. Nach dem Duett aus der Walküre zum Beispiel, waren wir überrascht und richtig glücklich, als uns die Leute die Existenz jener Dimension bestätigten, die über gutes Singen hinausgeht und die dieser Opern-Liebesgeschichte ein ganz besonderes Leben einhaucht. In einem Moment wie diesem, zeigt sich zweifelsohne, inwieweit ein zusammengeschweißtes Paar, wie wir eines sind, eine solche Szene noch steigern kann.

Voll und ganz. Ich habe in der Tat angefangen zu singen mit der inneren und felsenfesten Überzeugung, dass dies die „wahrhaftigste“ Art und Weise ist, mich auszudrücken und meine Existenz zu rechtfertigen. Ich hatte damals schon das (vielleicht noch ungenaue) Gefühl, dass es die starken, ja exzessiven Charakteren sind, die ich verkörpern will. Ich spürte, dass meine ersten musikalischen Emotionen mich zu diesen Figuren führen würden.
Ich erinnere mich noch, wie überwältigt und aufgewühlt ich war nachdem ich zum ersten Mal Salome gehört hatte. Genauso fühlte ich einen regelrechten Schlag in die Magengrube bei meinem ersten Wozzek. Meinen ersten Parsifal habe ich im Zuge eines Schüleraustausches an der Met gehört und dieser Opernabend war eine Offenbarung für mich... Ich komme aus einer Musikerfamilie, die Generationen zurückreicht und nun hat mich die Musik zweifellos wieder eingeholt. Sagen wir so, ich hatte günstige Ausgangsbedingungen.

Ich werde mich bald wieder in Eugen Onegin versenken, da ich Anfang Februar 2018 Tatjana an der Oper in Metz singen werde. Ich arbeite auch an Salomé, wie Sie sich sicher vorstellen können, aber auch an Sieglinde und Kundry, eine weitere sehr komplexe Figur. Isolde und Kostelnička stehen auch auf dem Programm für meine nächsten Treffen mit Deborah – welch spannendes Programm!
Ich denke auch an Dido, die meinem Geschmack nach Extremen nachkommen würde… Nachdem schon ich Béatrice et Bénédict, La Damnation de Faust, Benvenuto Cellini, Roméo et Juliette und Ascagne in Les Troyens gesungen habe, möchte ich die Rolle der Cassandre angehen. Vor ein paar Tagen haben wir darüber mit Lawrence Foster gesprochen, der mir sagte, dass ich eine Cassandre bin. Dasselbe hat mir übrigens auch John Nelson gesagt, als ich ihm noch mitten in meinem Fachwechsel vorgesungen habe. Als ich Lawrence Foster gestand, dass ich von dieser Rolle träume und dass ich mir sogar vorstellen könnte, beide Rollen, Didon und Cassandre, gleichzeitig zu singen, hat er geantwortet, dass er es nie wirklich sinnvoll gefunden hat, beide Rollen mit derselben Sängerin zu besetzen. Auf die Frage, warum ich das denn wolle, hätte ich ihm die humorvolle Antwort von Deborah Polaski zu diesem Thema zitieren können: „because you can!“. Aber ich habe dann Lawrence Foster ganz einfach mit einem Lachen erklärt, dass einer der Gründe, warum ich die Musik von Berlioz so sehr liebe, diese Dimension des Größenwahns ist, dieser Hang zum Exzess, den ich unbestreitbar in mir trage, selbst wenn man das von mir, außerhalb der Opernbühne, nie vermuten würde.

↑ Back to top